Nous avons choisi de vous amener cette fois à 8 km de la ville de Sligo à pied, là ou se trouverait selon une rumeur vieille de plusieurs millénaires, le cairn de la Reine Maëve (Medb).
Cette sépulture abriterait la tombe d’une guerrière mythologique évoquée dans le « Cycle d’Ulster ». Fille du roi Eochaid Feidlech, la Reine Maëve de Connacht régna d’une main de fer sur son territoire, à l’égal des hommes les plus ambitieux de son temps, quatre fois mariée tout de même et amante infatigable.

La Reine Maëve : figure mythique des légendes celtiques
L’un des passages les plus célèbres du « Cycle d’Ulster » - recueil de 24 récits celtiques datant de la civilisation préchrétienne - évoque celui de la Razzia des vaches de Cooley. Un raid mené par la Reine Maëve dans le but de dérober à un noble d’Ulster, un magnifique taureau brun - dit de Cooley - pour enrichir son cheptel.

Bien des hommes des royaumes du Connaught et d’Ulster périrent à cette occasion ; l’orgueil démesuré de Maëve marqua la mémoire des hommes d’antan et celle-ci devint le symbole absolu de l’ivresse du pouvoir et de la convoitise.
Chronique d’une mort annoncée
Le destin de tels dirigeants se termine souvent de la pire des façons et celui de Maëve n’échappa pas à la règle. Sa vie s’acheva aussi rapidement que fut lancée la pierre de la fronde de Mac Nessa - fils du roi d’Ulster Conchobar - alors qu’elle se baignait dans un étang de Galway.
D’aucuns prétendent que sa sépulture aurait été érigée au sommet de la montagne de Knocknarea (327 mètres). Il existe en tout cas à cet endroit, un cairn circulaire de pierres d’une dizaine de mètres de haut et de 55 mètres de large comportant en son sein un couloir.
Cette tombe néolithique classique est aujourd’hui endommagée par les marcheurs qui l’escaladent sans vergogne. A en croire les spécialistes, et comme toutes les reines et les rois de l’époque, il est probable que Maëve ait été enterrée debout, armes et bouclier au point.

L’édifice n’est pas isolé et des cairns comme ceux de Carowmore, Creevykeell ou encore Carowkeel, témoignent de constructions funéraires monumentales et élaborées dans ce comté de Sligo en Irlande, vielles de plus de 4000 ans av.JC, et antérieures à la construction des premières pyramides d’Egypte.
Sur le chemin de Tara, se trouve également une autre curiosité, à savoir un fort-colline baptisé au nom de la Reine, Rath Maëve, et dont il ne reste maintenant qu’un fossé démarqué près de la route.
La reine Maëve toucha Yeats en plein coeur
Le célèbre poète irlandais William Butler Yeats- prix Nobel de littérature en 1923 - fut comme tant d’autres, happé par cette terre suggestive et ces légendes celtes. Grand admirateur de spiritualisme, d’astrologie, de culture druidique, ses pas le menèrent à bien des occasions vers ce lieu magique.
Certains passages de ses écrits évoquent le souvenir de Queen Maëve dont la légende le toucha en plein cœur. Yeats fut d’ailleurs conquit par la beauté de quantités de lieux marquant le comté de Sligo : le village de Rosses Point, la cascade de Devill’s Chimney, la montagne de Ben Bulben…

Le poète irlandais resta toute sa vie fortement attaché à Sligo et à ses environs ; il y passa une grande partie de sa jeunesse avant de terminer ses jours dans le sud de la France d’être enterré en 1939 à Roquebrune-Cap-Martin, dans les Alpes-Maritimes. C’est en 1948 que le transfert de son corps fut organisé à sa demande ; sa sépulture repose désormais au pied de la montagne de Ben Bulben, dans le cimetière de Drumcliff.

« Quand les journaux m’auront oublié, déterrez-moi et ramenez-moi à Sligo ».
En tout cas cette histoire prouve une chose : la place importante occupée par certaines femmes dans ces premières sociétés ; beaucoup d’entre elles ont joué un rôle prépondérant tout au long de l’histoire celte antérieure à la chrétienté, qu’elles soient reine, déesse ou guerrière émérite.
Queen Maëve en tout cas ne s’en est pas laissée compter, vindicative et teigneuse, elle a attisée le respect et l’effroi aussi de bien des hommes.
Son empreinte s’est perpétuée au travers les siècles et il y a sûrement une part de vérité dans ce récit mythologique. En tout cas, celui-ci continue de faire travailler notre imaginaire.