Les nobles d’épée ont toujours eu pour obligation – en échange de terres et de généreux privilèges – de soutenir leur suzerain. Ce sont eux qui, à leur frais, devaient armer la soldatesque et qui, au premier coup de sifflet, accourait ventre à terre pour lutter aux côtés du roi ou assimilé.
En Ecosse et jusqu’au milieu du 18ème siècle, le système de clans imposait d’obéir de la même manière à un chef.
La dynastie des ducs d’Atholl qui créa le régiment des Atholl Highlanders, s’est épanouie sur près de 20 générations dans les Highlands et a pris ses racines dans les terres de Moray. Chaque duc fut ensuite désigné sous le nom de Duc de Murray.

L’actuel chef de clan, Bruce Murray (né en 1960), est le 12ème duc d’Atholl, il a succédé à son père John Murray, décédé en Afrique du Sud à l’âge de 83 ans.
Une armée privée d’opérette
La formation du régiment remonte à l’époque de ces clans et sa présence est attestée lors de la célèbre bataille de Culloden durant laquelle les écossais se firent déculotter par les armées anglaises en 1746.

Certains y verront une armée d’opérette équivalente à celle de la garde suisse pontificale, un pur anachronisme cher aux lecteurs du magazine Point de Vue, spécialisé dans l’actualité du gotha et de l’aristocratie.
Pourtant, lors du défilé annuel qui a lieu le dernier week-end de Mai à Blair Castle, qu’ils sont orgueilleux ces fantassins en kilt et tartan, le pompon accroché à la chaussette, oscillants au rythme de la cornemuse, des fifres et des tambours !

Cette parade menée par une centaine d’hommes est un symbole : celui de l’ordre, de la rigueur, de l’esprit de corps qui animait les anciens clans contre l’ennemi anglais. Les touristes - écossais ou non - qui assistent à ce spectacle « baroque » ne pipent d’ailleurs pas mot et l’on sent beaucoup de respect dans leurs regards.
Et si la moyenne d’âge dans les rangs de cette troupe paraît élevée, la cuisse reste néanmoins ferme et le pas martial. C’est un honneur de faire partie de ce régiment d’infanterie où il faut être coopté pour entrer. Les femmes bien sûr n’y sont pas autorisées, même en kilt et escarpins à bouclettes.
Tous les jours en haute saison, un Piper accueille les visiteurs à l’entrée du château.

Qui a eu quelques couacs (discordances)
Les Atholl Highlanders se sont illustrés au cours des siècles - et pas toujours de brillante façon : le 4ème Duc du nom expédia par exemple manu militari quelques milliers d’hommes en Irlande pour soutenir la cause de la Couronne (l’Irlande était encore rebelle à l’empire). Sans doute espérait-il pouvoir les jeter dans une mêlée glorieuse et en retirer quelques gloires, mais las, rien ne se passa comme prévu.
La troupe fut rapatriée à Portsmouth pour rejoindre des bataillons de réserve envoyés en Amérique… mais resta sur le quai.

Plus tard, elle échappa une nouvelle fois à un ordre de mutation vers l’empire des Indes cette fois, de quoi rendre fou ne serait ce qu’une moitié de duc !
Les Atholl Highlanders retrouvèrent grâce aux yeux de sa Gracieuse Majesté et en particulier de la Reine Victoria, lorsque celle-ci se rendit au Perthshire en 1844 avec son époux. Le couple fut logé à Blair Castle durant 3 semaines et il est dit que chaque matin, le Prince Albert se réveillait au son de la cornemuse. La petite histoire ne nous dit pas cependant si cela était de son plein gré…

Blair Castle, un château ancré dans l’histoire
Castle Blair fut au 13ème siècle une construction défensive située sur un axe stratégique qui menait à Inverness, la capitale des Highlands.
Au milieu d’une campagne paisible, il s’élève devant des collines boisées surplombant la rivière Garry et offre l’une des plus belles vues d’Écosse.

Forteresse médiévale un peu froide au 13ème siècle, transformée en manoir géorgien au milieu du 19ème siècle, Blair Castle devint ensuite un beau château de style victorien. Les fortunes diverses des ducs de Murray permirent des réaménagements successifs jusqu’à la fin du 20ème siècle.
A l’heure actuelle, une trentaine de pièces sont accessibles au public avec des collections d’armes et d’armures, de très beaux meubles Chippendale, des porcelaines, ainsi qu’une magnifique salle de bal. Une balade s’impose également dans les jardins.

On ne peut s’empêcher de penser, en parcourant la galerie de portraits de famille, aux personnages illustres qui défilèrent ici : Bonnie Prince Charles y séjourna au moment de la formation de l’armée jacobite, tout comme Mary Queen of Scots.
Durant son retour « forcé » en Ecosse, Marie Stuart voyagea de château en château un peu comme une bouteille jetée à la mer. Ses pas l’amenèrent à Blair Castle en 1564 ou elle participa à une chasse durant laquelle 360 cerfs et cinq loups furent abattus. Un moment de relâchement sans doute dû au stress…

Les visites au public qui ont lieu traditionnellement d’avril à octobre, furent mises en place en 1936, et Blair Castle fut l’une des premières maisons privées de Grande Bretagne à le faire.
En 1996, au décès du 10ème Duke & Earl of Atholl, l’endroit fut confié à une institution chargée de le gérer. Peut-être à la grande déception du 12ème du nom Bruce Murray resté en Afrique du sud, mais qui s’en retourne chaque mois de mai à Castle Blair mener la parade évoquée ci-dessus.
Poursuivre sa visite du Perthshire
Il serait dommage de ne pas poursuivre cette échappée belle dans les magnifiques paysages de l’ancien comté de Perthshire surnommé le « Pays des arbres géants » et qui est effectivement couvert de jardins multiples et de forêts luxuriantes.

N.B : pour l’anecdote, le Perthshire abrite un arbre de plus de 2000 ans, l’if de Fortingal, dans le cimetière de la commune du même nom ; il est considéré comme le plus vieux d’Europe.
En partant de Blair Castle, il ne faut pas manquer de visiterl’une des distilleries du pays comme (Bell’s Blair Atholl, Edradour, Dalwhinnie) ou bien passer faire quelques emplettes de tricots en laine d’agneau ou de pulls Shetland à la Maison de Bruar.

L’endroit propose un département d’accessoires de pêche et de loisirs de plein air. Ici c’est sûr, on repart rarement les mains vides, mais les plus fauchés devront certainement s’abstenir car les prix sont à la mesure de la qualité des articles.
A partir de la charmante ville de Pitlochry, les reliefs sauvages du Glen Lyon ou du Glen Shee permettent d’alterner la balade entre vallées et montagnes ; ils ont été longuement décrits par l’écrivain romantique écossais Sir Walter Scott.

Tous ceux qui ont des fourmis dans les jambes et soif de grands espaces apprécieront les prestations d’activités outdoor proposées par de nombreux spécialistes sur place : la pêche à la truite, la randonnée à pied ou le VTT, le rafting et le canoë en eaux vives…
La ville de Perth quant à elle, s’est développée sur le fleuve Tay et conserve de nombreux vestiges culturels ; cette ancienne capitale d’Ecosse abrite des lieux culturels renommés comme la Ferguson Gallery, le Perth Museum & Gallery et l’église St John’s ou officia John Knox.

Ce contemporain de Marie Stuart alluma la mèche de la Réforme pourrait-on dire dans cette église : après un sermon bien senti, il déclencha la guerre entre l’église catholique et celle des protestants anglicans.
Enfin, et pour ceux qui voudraient encore visiter un dernier château avant de retourner prendre leur avion à Glasgow, deux options se présentent : Scone Palace au nord de Perth qui fut l’ancien site de couronnement des rois, ou Stirling Castle où naquit Jacques IV, époux de Marie de Guise et père de Marie Stuart.

Depuis les créneaux de la muraille accueillant la batterie de canon, on peut voir par beau temps dans ce dernier château, le monument dressé à la mémoire de Sir William Wallace, the National Wallace Monument. Dans le film « Braveheart », le beau Mel Gibson incarne ce chevalier héroïque écossais. Il est d’ailleurs à noter que les Murray se sont illustrés aux côtés de William Wallace lors de la bataille de Stirling Bridge en 1297.

Avouez que c’est un pur bonheur de marcher sur les traces de la dernière armée d’Europe tout en découvrant quantité de lieux fascinants de la région du Perthshire en Ecosse.